Catégorie : Educ' et doc'

Mon métier consiste à transformer des larves en papillons. Hé ouais.
Dans cette catégorie, les réflexions qu'il m'inspire. Les anecdotes de cours sont regroupées dans la catégorie Le plus beau métier du monde.

Le document de collecte : présentation (1)

Rédigé par Métro-Boulot-Catho -

J'entame ici la présentation d'un travail que j'espère développer au long de l'année, avec mes élèves et mes collègues, sous des formes diverses, autour d'un outil extrêmement intéressant : le "document de collecte".

Cette expression, pas très heureuse au demeurant, s'inspire d'un article de Nicole Boubée consultable sur ArchiveSIC : Le rôle des copiés-collés dans l’activité de recherche d’information des élèves du
secondaire
(2008) ; la lecture de ce texte vous sera indispensable si vous souhaitez comprendre la suite des évènements. L'utilisation que je cherche à en faire s'inspire très directement de l'expérience décrite par l'auteur (anonyme) du blog mesdocsdedocs et, là aussi, je vous renvoie à la présentation qu'elle en a faite dans ces différents articles :

Désolée de vous infliger cette énumération de références, dictée autant par la nécessité que par la reconnaissance.

Essayons de résumer le problème.

La question du copié-collé dans la démarche de recherche d'information par les élèves est régulièrement soulevée. Certains professeurs ont abandonné l'idée de leur faire rechercher des informations par eux-mêmes ("je ne vais pas corriger internet !"), ce qui me parait fort dommageable tant à leur motivation qu'à leur formation. La plupart des autres ont de facto rendu les armes en acceptant de corriger des pseudo copiés-collés, ce qui ne peut qu'encourager les élèves à continuer.

Pour des raisons de commodité évidentes, un élève placé en situation de recherche ira au plus basique : taper le sujet dans Google, ramasser quelques sites parmi les premiers (donc Wikipedia), et copier-coller des paragraphes entiers. Comme ses professeurs lui ont bien fait la leçon sur le copié-collé, l'élève va arranger ce copié-collé (fermez violemment les guillemets). Cet arrangement consiste, en gros, à transformer la phrase

> Alexandre le Grand est né en -356

en

> Alexandre le Grand naît en -356.

Pour lui, ce n'est plus du copié-collé. Le problème est évidemment que non seulement, on reste dans le plagiat, mais (plus grave car plus immédiat pour le pédagogue) au terme de cette charcuterie grammaticale l'élève est incapable de dire à quelle époque a vécu Alexandre le Grand.

Des élèves très scolaires, très doués peuvent retirer quelque chose de ce travail : je garde le souvenir d'un petit 5e venu au CDI préparer un exposé sur Carthage - sur son écran, du texte au kilomètre. Croyant le piéger, je lui demande de "me parler de Carthage", sans regarder l'écran. J'ai dû l'arrêter au bout de 5 minutes, au milieu de la deuxième guerre punique. Il avait tout retenu. Mais pour le collégien moyen, le copié-collé-arrangé n'est pas efficace sur le plan de l'acquisition des connaissances.

La difficulté pour le professeur vient alors dans l'évaluation et la notation chiffrée de ce travail. Il n'est décemment pas possible de mettre une mauvaise note car, indéniablement, il y a eu du travail de la part de l'élève. Il s'est probablement fait aider par un parent, lequel attend lui aussi "sa" note. Mais attribuer une bonne note parce que les connaissances attendues sont présentées, alors qu'une connaissance présentée n'est pas forcément acquise, ne fait que valider le procédé (l'élève recommencera au prochain travail de recherche puisque cela lui rapporte de bonnes notes). On encourage donc une méthode qui n'est pas efficace au plan cognitif.

C'est à ce problème que les professeurs-documentalistes ont des solutions à proposer, comme l'oublient trop souvent nos collègues de disciplines. Une de ces solutions, très intéressante à mon avis, est le document de collecte.

Intéressante parce que réaliste. Réaliste parce qu'elle s'appuie sur le réflexe Google des élèves, donc sur leur vécu (qui est aussi celui de leurs professeurs, soit dit en passant). On peut bassiner les élèves avec les étapes de la recherche : je questionne le sujet (quiquequoioù....), je définis des mots-clés, gnagnagna. Les élèves le feront en séance en classe pour faire plaisir au professeur ; mais aussitôt rentrés chez eux, ils retourneront à leur petite charcuterie grammaticale. On ne peut pas lutter contre le vécu des élèves, quand la technologie l'alimente.

Intéressante parce que, je crois, efficace. Efficace parce que le document de collecte oblige l'élève à lire l'information collectée, et à l'analyser pour la classer et l'exploiter convenablement. Le copié-collé, devenu une étape de la recherche d'information (et non plus son aboutissement), prend une vraie légitimité - à la plus grande surprise des élèves ("Mais Madame, on peut vraiment faire du copié-collé ?!") !

(à suivre ... )

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