J'ai, dans ma classe de 5e de cette année, un élève qui est un véritable sketch à lui tout seul. Intelligent en diable, mais susceptible comme un pou. Du genre à bouder comme un gamin pour un oui ou pour un non. Je ne compte plus ses "ça s'fait pas" indignés ; je ne les compte plus, car pour tout avouer, je m'amuse à les provoquer, le sachant assez fin pour comprendre peu à peu cet humour.
On l'entend tout à l'heure sortir une énormité : "Le Bangladesh, c'est en Afrique".
Tous les autres se retournent vers lui pour le chambrer. Bon prince, il reconnait son erreur avec le sourire et lance : "L'erreur est humaine".
Je décide de le provoquer. "Oui, mais vous, est-ce que vous êtes humain ?"
Comme prévu, il s'indigne, et j'entends son "ça s'fait pas !" immédiatement suivi de son visage boudeur. Il me lance alors : "Et vous, vous êtes une mammifère même pas identifiée".
Petit frisson des autres qui retiennent leur souffle devant l'impertinence de leur camarade. Je prends le parti d'en rire franchement : "Ah, non, mais moi je ne suis même pas une mammifère du tout : je suis un monstre !"
Même lui a rigolé.
...
Un peu plus tard, il rechigne à copier une définition, un peu longue. Il m'explique alors très sérieusement : "Mais moi, Madame, pour les définitions, j'apprends juste la première phrase : direct, efficace !"
Moi, du tac au tac : "Ah, alors je vais corriger vos copies comme ça : juste les trois premières questions : direct, efficace !"
Il s'indigne immédiatement et commence : "ah mais ça s'...".
Et là il s'est arrêté net, comprenant qu'il était coincé.
Si ce blog n'a pas été conçu comme une tribune politique, je voudrais exprimer quelques réflexions à propos de la loi dite "de bioéthique" (mais qu'a-t-elle encore de bio- ou d'éthique ?) actuellement en cours d'adoption.
Parce que cette loi a été définie comme une ouverture de droits aux homosexuels (alors même qu'elle contient des dispositions concernant
l'utilisation des embryons humains qui n'ont plus rien à voir avec la
question de l'homoparentalité, et qui tendent à nous rapprocher
dangereusement d'un roman d'Aldous Huxley), s'affirmer contre expose immanquablement à l'accusation d'homophobie.
Vous avez probablement déjà entendu l'expression faire son salut, et très probablement aussi gagner son paradis. Si je savais confusément qu'elles ne sont pas très chrétiennes, parce que peu compatibles avec l'idée d'une gratuité de la miséricorde, j'ai longtemps eu du mal à mettre le doigt sur le problème. C'est venu cet été.
Le point à bien comprendre, c'est qu'on n'a pas besoin de faire son salut, mais il faut le recevoir.
Que veut dire souhaiterà ses élèves de "réussir", comme il est d'usage au moment de les quitter ?
Dans la vie, il y a des projets que l'on réussit, et d'autres que l'on rate, parce que tout ne dépend pas de soi, et parce qu'on est souvent amené à prendre des décisions sans connaître tous les paramètres à l'avance. On n'apprend pas assez, en France, à bien vivre l'erreur. Les tests internationaux tendent à montrer que les petits Français préfèrent s'abstenir que risquer de se tromper.
Pourtant, savoir transformer l'échec en expérience, en tirer un enseignement utile pour la suite, c'est un trésor fondamental puisque, d'une certaine façon, il n'y a jamais d'échec pour qui sait le vivre comme une expérience. C'est la réflexion qui vient à la lecture, hautement recommandable, des Vertus de l'échec, de Charles Pépin.
C'est une chose que j'aurais aimé entendre à leur âge.