Modèle vivant (3)
Rédigé par Métro-Boulot-Catho -Une dernière petite série pour finir l'année...
Une dernière petite série pour finir l'année...
L'avancée en âge, puis la mort, des grands-parents, font évoluer les habitudes contractées dans l'enfance. La maison où l'on a passé ses vacances change de mains, légalement ou symboliquement, et il devient impossible de s'y rendre.
Symboliquement plus que légalement. Il n'est même pas besoin que les murs et le toit change de propriétaire au sens juridique. Parce qu'une maison, ce n'est pas seulement les murs et le toit.
Ce qui définit la propriété d'une maison, ce n'est pas tant le contrat qui établit la possession juridique, que les mille et unes petites habitudes et règles que le maître - et la maîtresse - des lieux définissent et établissent, au moment de l'acquisition (et du projet qui la motive), et au fil du temps. La vie d'une maison est faite de tous ces petits rituels : Untel se lève tôt, Unetelle fait la sieste après le repas, Tels font une partie de scrabble à cette heure délicieuse où le soleil commence à tomber, quand l'air ne pèse plus rien.
Ces petites habitudes donnent la couleur d'une maison, si bien que même en l'absence des maîtres de maison, elle reste la leur, elle reste identifiée comme "la maison des grands-parents". Si les occupants occasionnels se permettent parfois (en l'absence des maîtres des lieux) de transgresser quelques unes de ces habitudes qu'ils peuvent juger un peu absurdes, ils les acceptent néanmoins de manière générale, parce qu'elles sont celles qui font les lieux.
Vient le moment où l'avancée en âge et en maladie rend impossible que le propriétaire "en titre" revienne occuper en personne les espaces qu'il a empli de ses habitudes. Et quelqu'un transgresse une de ces habitudes, provoquant des circonstances qui vous empêchent d'y séjourner.
Il vous répond que ce n'est qu'une question de calendrier ; que vous n'avez qu'à venir à un autre moment. Mais on sent qu'il y a quelque chose de définitif dans cette transgression, que par elle il se fait propriétaire de la maison. La maison a perdu une part de son identité, elle n'est plus tout à fait "la maison des grands-parents". Et vous n'êtes plus sûr d'avoir seulement envie d'y retourner, car vous n'y retrouveriez plus ces milles rituels qui lui donnaient son âme.
Peut-être est-ce bien ainsi. Mais c'est un peu triste.
Fin d'année. Le conseiller d'éducation des 5èmes vous annonce que cet élève, qui a pourri la classe toute l'année parce qu'il s'ennuyait en cours alors qu'il rêve d'être pâtissier, a été pris aux Apprentis d'Auteuil ; il y suivra une formation professionnelle les après-midis. Le gamin est ravi.
Penser à toutes les colles et tous les avertissements de discipline qu'on s'est retenu de mettre pour ne pas charger son dossier scolaire et obérer ses chances d'être pris quelque part.
Et sourire.
Dessin au crayon, parfois emploi du fusain, premier trimestre 2015. Le temps de pose varie (de 5 minutes à 45 minutes), il est parfois indiqué en bas à côté de la date - quand la date est elle-même indiquée !
Une conférence donnée en janvier dernier par le père Jean-Philippe Fabre au Collège des Bernardins avait pour thème cette réflexion souvent entendue, dissociant Jésus de l'Eglise. Nombre de nos contemporains affirment accepter Jésus comme un "maître à penser", mais refuser l'Eglise catholique et romaine comme institution normative.
À proprement parler, pas de grosse surprise dans cette conférence au sens où il ne faut pas attendre d'un prêtre catholique qu'il relativise, voire annule, la place de l'Église dans le dessein de Dieu. Mais sa réflexion est intéressante pour la place qu'il donne aux objections formulées.